C’est une horreur que trop de gens peinent encore à qualifier de « génocide ». Il y a plus d’un an, l’État israélien entamait une campagne de bombardements sur Gaza. L’attaque se voulait une réponse au massacre épouvantable de civil·es commis par le Hamas les 7 et 8 octobre 2024 sur différents lieux du territoire israélien, accompagné très probablement de violences sexuelles, ainsi que de la prise en otage de 251 personnes.
Il importe de s’alarmer que ces bombardements visant la population civile de Gaza non seulement se produisent, mais perdurent et se banalisent en dépit des protestations incessantes de l’ONU et des appels à la retenue, le plus souvent inaudibles, de certain·es dirigeant·es des pays occidentaux. Depuis plus d’un an, des enfants meurent à Gaza : ils seraient au moins 11 000. Des journalistes meurent à Gaza : ils seraient au moins 140. La destruction des villes – au point que le terme d’« urbicide » y prend tout son sens –, des institutions et des liens sociaux, l’annihilation de la plus élémentaire idée d’humanité y sont telles, que le chiffrage exact des dégâts humains et matériels prendra certainement des années.
À l’heure où nous écrivons ces lignes, le Moyen-Orient plonge dans un chaos, dont personne ne sait où il mènera. Et, à l’approche d’un nouvel hiver, le martyr de Gaza continue dans le silence. C’est la poursuite d’un tel scandale qui nous a amenées à donner la parole à Rima Hassan et Médine. Députée européenne La France insoumise depuis juin 2024, Rima Hassan est l’un·e des porte-voix les plus visibles de la défense des droits des Palestinien·nes. Figure singulière de la scène rap, Médine est également militant antiraciste. L’une et l’autre ont été accusé·es d’antisémitisme : nous les avons interrogé·es sur le sujet en refusant la moindre complaisance. Les deux font l’expérience de la violence spécifique réservée aux minorités non blanches ; les voilà en première ligne face au phénomène d’extrême-droitisation de la scène politique et médiatique française qui vient de connaître une nouvelle épiphanie avec la nomination d’un gouvernement plus raciste et réactionnaire que jamais.
Une dizaine de ministres du nouvel exécutif nommé fin septembre 2024 se sont distingué·es pour leurs prises de position contre le mariage pour tous·tes, la procréation médicale assistée, l’interruption médicale de grossesse ou les transitions de genre chez les mineur·es. Au point que dès sa première intervention télévisée, Michel Barnier a dû rassurer et promettre qu’il ne reviendrait pas en arrière, notamment sur l’avortement. « Le fait qu’Emmanuel Macron ait choisi un Premier ministre de droite ne doit pas nous décourager, parce que nous, on a pris nos responsabilités et on a vu que ça pouvait avoir des effets », rappelait notre chroniqueuse Goundo Diawara lors de la soirée de lancement, en septembre dernier, du numéro spécial de La Déferlante consacré aux luttes féministes contre les extrêmes droites.
Des femmes noires et asiatiques prennent aussi la parole dans ce numéro pour tenter de défaire le silence qui entoure les violences sexistes et sexuelles commises contre les femmes racisées dans le milieu de la culture. Si le #MeToo des actrices blanches fait sentir ses effets, les artistes minorisées peinent encore à se faire entendre.
Caisse de résonance des combats féministes et antiracistes, La Déferlante se veut plus que jamais, en cette fin d’année 2024, un espace pour défaire les silences qui recouvrent les oppressions systémiques.