Des vies, elle en a eu plusieurs. Des noms, elle en a deux. « Ovidie » est le pseudo qu’elle s’est choisi autrefois pour travailler comme actrice et réalisatrice dans le milieu du porno. C’est aussi celui sous lequel elle signe des livres et des documentaires pour des médias prestigieux. Quant au nom « Éloïse Delsart », sous lequel elle figure à l’état civil, il lui sert désormais dans le monde universitaire, où elle a reçu récemment le titre de docteure ès lettres. Carte blanche à Ovidie/Éloïse, qui se demande comment faire corps avec ces identités superposées.
« Et toi, tu as choisi quoi comme nom de guerre ? » Il y a des décisions prises sur un coin de table qui scellent un destin. Un pseudonyme griffonné à la va-vite en bas d’une autorisation de diffusion, la première d’une infinie série. Une nouvelle identité marquée au fer rouge, à jamais dans ma chair, à défaut de figurer sur mon passeport. L’acceptation de devenir deux, et la prise de conscience à seulement 18 ans que le nouveau personnage que j’étais en train de créer ne m’appartiendrait plus jamais sitôt le contrat signé.
Ovidie n’est pas mon nom. Ou plutôt si, il l’est devenu par la force des choses. Sous ce nom, cela fait plus de vingt ans que je réalise des fictions et documentaires, que j’écris, que je milite. Jusque-là, pourquoi pas, je ne suis pas la première artiste à travailler sous pseudonyme. Mais le fait est qu’Ovidie était également mon nom de travailleuse du sexe lorsque j’exerçais cette activité, entre 1999 et 2002, et que je n’ai jamais souhaité en changer. Qu’il me sert aujourd’hui pour des activités socialement adoubées, des productions culturelles pour Arte ou France Culture par exemple, comme il m’a servi par le passé au sein d’une industrie que beaucoup regardent comme la lie de notre société.
Mais qui opte comme ça pour un autre nom ? Celles qui à la fois veulent renaître et […]
Retrouvez l’intégralité de cette Carte Blanche à Ovidie dans La Déferlante #8.