No Anger : « La sexualité des personnes handicapées est infantilisée »

par

Alice Bienassis
Dans cet entretien, l’artiste et politiste No Anger analyse la manière dont les représentations culturelles figées des corps « hors normes » nous emprisonnent dans une vision limitée et limitante du désir. Dès lors, comment faire en sorte que la sexualité des femmes, des personnes LGBT+ et des personnes handicapées se libère du poids des regards normatifs ? 

 

Activiste, artiste et cher­cheuse, No Anger s’est d’abord fait connaître en 2014 par son blog, À mon geste défen­dant, dans lequel elle mène, à par­tir de sa propre expé­rience, une réflexion fémi­niste et queer sur le han­di­cap phy­sique. Elle réa­lise aus­si des per­for­mances artis­tiques dans les­quelles elle se met en scène, et déve­loppe une pen­sée cri­tique du vali­disme, qui fait du vécu des per­sonnes han­di­ca­pées une expé­rience non sou­hai­table. No Anger est éga­le­ment doc­teure en sciences poli­tiques. Dans sa thèse, elle ana­lyse com­ment la vision du monde pro­duite par la télé­vi­sion, le ciné­ma ou la publi­ci­té impacte la manière dont sont com­mu­né­ment per­çus les corps des femmes et des per­sonnes LGBT+ et aliène leur sexualité. 

 

Quels effets les repré­sen­ta­tions tra­di­tion­nelles de la sexua­li­té ont-elles sur notre regard, et donc sur nos sexua­li­tés? 

Ma thèse s’inspire en par­tie des épis­té­mo­lo­gies fémi­nistes qui montrent que c’est le point de vue mas­cu­lin – et donc domi­nant – qui struc­ture les visions du monde et la pro­duc­tion des savoirs. Ma seconde source d’inspiration est la socio­lo­gie bour­dieu­sienne, qui pose que la vision domi­nante du monde est celle pro­duite par la classe la plus pri­vi­lé­giée parce que c’est elle qui pos­sède les moyens de pro­duc­tion et de dif­fu­sion des dis­cours sur le monde – et donc sur les corps, via le ciné­ma et les médias. 

Au fil du temps, les manières de pen­ser les corps se sont réduites, car cette nar­ra­tion domi­nante s’est natu­ra­li­sée –elle est main­te­nant per­çue comme natu­relle– et n’est plus remise en ques­tion. Elle est pen­sée comme le seul regard pos­sible: j’appelle ça le ver­rouillage du regard. Les oppres­sions que subissent les femmes et les per­sonnes queer sont struc­tu­rées par […]

Retrouvez cet entre­tien avec l’ac­ti­viste, artistes et cher­cheuse No anger, La Déferlante #9.

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Retrouvez cet article dans la revue papier La Déferlante n°9, de février 2023. La Déferlante est une revue trimestrielle indépendante consacrée aux féminismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abonnement, elle raconte les luttes et les débats qui secouent notre société.

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