Comme toute bonne réunion familiale qui se respecte, Noël est souvent l’occasion de voir ressurgir des stéréotypes en cascade : déballage de jouets genrés, femmes affairées en cuisine et, à la fin du repas, une bonne comédie hétérocentrée émaillée de quelques blagues racistes. Pourtant, si dans la répartition des tâches en famille, l’évolution est lente, sur les écrans, les choses sont peut-être en train de changer.
On se souvient du drame romantique Carol, en 2015, dans lequel deux femmes vivant dans les années 1950 tombaient amoureuses sur fond de fêtes de Noël. On peut aujourd’hui découvrir Ma belle-famille, Noël et moi – dans lequel Kristen Stewart prévoit de demander sa copine en mariage entre le fromage et la bûche. Dans Que souffle la romance, un jeune homme gay désespérément célibataire, tente de berner sa famille en invitant son meilleur ami à dîner au réveillon. Rien de très révolutionnaire dans ces intrigues. Mais les personnages : des gays, des lesbiennes, des femmes indépendantes, font souffler sur les films de Noël un air de renouveau. Proposées depuis quelques années par la plupart des plateformes VOD et SVOD ces comédies de fin d’année aux thématiques féministes ou LGBT+ sont produites aux États-Unis, en Espagne, mais aussi en France.
Les trois épisodes de Christmas Flow, sortis l’année dernière sur Netflix, mettent en scène la rencontre amoureuse d’un rappeur misogyne et d’une journaliste féministe. Sans aller très loin dans son message politique, la minisérie témoigne malgré tout d’un changement d’époque : « Il y a beaucoup de digues qui ont sauté ces dernières années, explique sa coscénariste Marianne Levy, parce que l’intimité est devenue quelque chose qui est mis en débat. Ça permet de donner de la place à des créations qui embrassent ces questionnements. » De fait, les intrigues interrogent de plus en plus souvent les stéréotypes et les logiques d’oppression. Dans Christmas Flow, l’amoureux rappeur prend conscience de ses biais sexistes et finit par modifier les paroles de ses chansons : « Nous avons voulu interroger la limite de l’art, la responsabilité de l’artiste et le traitement médiatique du féminisme », analyse Marianne Levy.
« Les gens ont envie de regarder des choses différentes. »
Ce changement de perspectives, à l’œuvre dans les comédies de Noël, raconte plus largement l’évolution de l’ensemble des productions. « Ce n’est pas qu’une question d’image et de “feminism washing”, analyse la scénariste et réalisatrice Léa Domenach, mais c’est aussi que les gens ont envie de regarder des choses différentes. » La série Jeune et Golri (OCS) qu’elle a cosignée avec Agnès Hurstel, en 2021, a reçu le prix de la meilleure série française au festival Séries Mania.

Ma belle-famille, Noël et moi, met en scène un couple de lesbiennes passant les fêtes dans leur famille très conservatrice.
Pour autant, « il n’y a pas encore d’industrie du cinéma où les films féministes sont majoritaires » explique Pauline Le Gall, journaliste et autrice d’un essai intitulé Utopies féministes sur nos écrans (éditions Daronnes, 2022). Peut-être parce que les réalisateurs restent […]
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