L’acronyme Terf pour « trans-exclusionary radical feminist » (féministe radicale excluant les personnes trans), désigne des personnes ou groupes de personnes, à l’origine issues de la gauche, se revendiquant féministes mais s’engageant depuis plusieurs années dans un militantisme violemment antitrans. L’exemple le plus connu est celui de la romancière britannique J.K. Rowling, autrice de Harry Potter, qui prend régulièrement la parole sur les réseaux sociaux pour s’attaquer aux femmes trans et finance des collectifs antitrans. On observe une structuration des mouvements terfs au Royaume-Uni depuis près de dix ans, avec notamment la création en 2017 de l’organisation Women’s Place UK pour s’opposer au projet de réforme du Gender Recognition Act et réclamer l’exclusion des femmes trans des lieux d’accueil des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles.
Certaines militantes terfs préfèrent se qualifier de « gender critical » (critique du genre) et revendiquent l’appellation « femellistes ». C’est le cas des Françaises Dora Moutot et Marguerite Stern, qui se définissent comme des « femelles humaines » et ont lancé le mouvement Femelliste, conçu, selon leurs termes, « comme force d’opposition face à l’idéologie transgenre ». Cette supposée « idéologie transgenre » relève très largement de théories complotistes, comme le rappelle notre enquête « Complotisme et transphobie : l’alliance des haines ». Même si les mouvements terfs ont pris de l’ampleur ces dernières années, les discours antitrans sont à replacer dans une longue série de débats qui ont ponctué l’histoire du féminisme depuis les années 1970. « Comme tout mouvement d’opprimé·es, le mouvement pour les droits des femmes connaît des dissensions […] qui s’enracinent souvent dans des logiques d’oppression, explique le sociologue Emmanuel Beaubatie. Qui appartient au sujet politique femme ? Qui a sa place dans les mobilisations féministes ? Les rapports sociaux et de pouvoir n’épargnent rien ni personne, pas même les collectifs qui entendent les combattre. »
Pour aller plus loin
Clémence Allezard, « Les mauvais genres : trans et féministes », Un podcast à soi no 25, Arte Radio, 2020.