La première fois que la photographe Lindsay Morris a séjourné au Camp I Am, c’était en 2008. Venue avec son fils Milo, elle a commencé à documenter cette colo pas comme les autres, qui avait vu le jour l’année précédente. C’est la mère de Danny, un jeune garçon amateur de paillettes et de princesses, qui en avait eu l’idée. Le Camp I Am rassemblait des enfants comme lui, trop à l’étroit dans la binarité fille-garçon. Parfois accompagné·es de leurs frères et sœurs, iels pouvaient y explorer en toute fluidité la palette des expressions de genre, dans leur manière de s’habiller comme dans leurs jeux. Quant aux parents et proches, iles trouvaient là une occasion de partager leur expérience d’accompagnant·es, parfois en compagnie d’expert·es des transidentités.
Le Camp I Am a d’abord compté une majorité d’enfants assignés garçons à la naissance. Puis au fil du temps, leurs profils se sont diversifiés, aussi bien racialement que dans la multitude des identités de genre exprimées. Les organisateur·ices, tous·tes volontaires, ont prit soin de maintenir l’initiative dans une relative discrétion. En 2012, parents et enfants ont néanmoins accepté que The New York Times Magazine publie quelques photos de Lindsay Morris. Une première mise en lumière pour une expérience qui s’est répétée chaque été jusqu’en 2016, et qui, depuis, a été répliquée aux États-Unis et dans d’autres pays.
Aujourd’hui plus visibles qu’en 2007, les mineur·es queer sont victimes des attaques de l’extrême droite américaine: en février 2022, le gouverneur républicain du Texas Greg Abbott a ainsi fait passer une directive visant à criminaliser les parents qui accompagnent leurs enfants dans une transition de genre.
Les pionnier·ères du Camp I Am, que Lindsay Morris a suivi·es pendant plusieurs années, sont maintenant de jeunes adultes. La photographe est allée les photographier une ultime fois en 2021, accompagnée de la journaliste Ruth Padawer, qui a recueilli leurs souvenirs. Tous·tes disent comment ce camp d’été très particulier, en brisant leur isolement, leur a permis de se construire.