En novembre 2020, dans un podcast intitulé La Fille sur le canapé, l’autrice Axelle Jah Njiké a raconté le viol dont elle a été victime à l’âge de 11 ans. Pour La Déferlante, elle revient sur ce qui l’a décidée à prendre la parole. Ce faisant, elle s’interroge sur le silence assourdissant qui entoure encore la question des violences sexuelles subies par les femmes noires, et dénonce le biais racial qui le fonde.
« Je m’appelle Axelle Jah Njiké et, lorsque j’avais 11 ans, j’ai été violée sous le toit sous lequel je grandissais. Mon agresseur d’une vingtaine d’années, était l’un des hommes de mon cercle familial » C’est ainsi que commence le podcast La Fille sur le canapé, diffusé un matin de novembre 2020. J’avais beau être à l’initiative de ce programme, l’avoir élaboré de A à Z, je ne m’attendais pas à fondre en larmes en m’entendant dire ces mots. Ce n’était pourtant pas la première fois que je les prononçais. J’avais déjà eu l’occasion de relater publiquement mon viol, que ça soit en tant que chroniqueuse, intervenante – ou participante – dans des événements consacrés au care et destinés aux personnes afrodescendantes. En août 2017, j’avais proposé à un producteur renommé le texte donnant son titre au podcast. Il l’avait trouvé « fort mais dérangeant » selon ses termes, et m’avait répondu « craindre que, à l’écoute, [ses] auditrices et auditeurs se disent “mais pourquoi j’écoute ça ?” ». Cet échange avait eu lieu exactement six semaines avant l’émergence du mouvement #MeToo. Je m’entends évoquer à nouveau, dans le cadre du podcast, l’agression subie ; je suis censée être « habituée » à en parler.
IL ME SEMBLAIT ENTENDRE LA PETITE FILLE QUE J’ÉTAIS
Pourtant quelque chose cède. Rompt. Peut-être est-ce dû à la charge émotionnelle des semaines qui ont précédé, la tension accumulée dans le cadre de la préparation, le sentiment de poser enfin quelque chose qui pèse une tonne. […]