Du film Autant en emporte le vent à l’opéra Carmen, le monde de la culture est régulièrement secoué par des débats sur les représentations racistes et sexistes qui traversent ses productions. #MeToo a accentué le dilemme des spectateur·ices : que faire des œuvres problématiques de Picasso, de Polanski et de Cantat ? Les voir ou les boycotter ? Débat entre la metteuse en scène Eva Doumbia, l’historienne du cinéma Geneviève Sellier et la directrice de théâtre Carole Thibaut.
Qu’est-ce qui constitue, selon vous, une œuvre «problématique»?
EVA DOUMBIA C’est le contexte dans lequel elle est présentée. Certains groupes sociaux vont estimer que telle œuvre est problématique pour eux tandis qu’elle ne l’est pas pour d’autres. En fait, forcément, n’importe quelle œuvre, compte tenu de la diversité des opinions, sera problématique.
CAROLE THIBAUT Effectivement, il me semble que, d’une certaine manière, une œuvre d’art est forcément problématique. Ce qui fait la valeur artistique d’une œuvre, c’est le fait qu’elle pose question, qu’elle remue les représentations conventionnelles du monde. La question c’est donc plutôt: auprès de qui l’œuvre pose-t-elle problème? Et pourquoi ?
GENEVIÈVE SELLIER Je vais dans le même sens : c’est vraiment une question de réception. Beaucoup d’œuvres qui ont été considérées autrefois comme des chefs‑d’œuvre ne sont plus regardables de nos jours. Ou tout au moins, elles sont «problématiques » pour des féministes. Le débat a surgi récemment parce que les présupposés idéologiques de ces œuvres, en particulier en termes de genre, sont devenus visibles, alors que jusqu’à maintenant, ils ne l’étaient pas.
Nombre d’entre nous se demandent comment réagir, en tant que spectateur·ices, face à une œuvre porteuse de représentations racistes, sexistes ou homophobes. Quelles réponses peut-on apporter à cette question ?
EVA DOUMBIA Cette année, nous célébrons les 400 ans de la naissance de Molière. Or, si on regarde son œuvre d’un point de vue contemporain, déconstruit, féministe et antiraciste, on voit que […]
Retrouvez ce débat « Que faire des œuvres problématiques ? » dans La Déferlante #8.