En 2020, Tal Madesta entame une transition de genre. Pendant plusieurs mois, il oscille entre le soulagement et un vertigineux sentiment de vulnérabilité. Mais cette épopée, placée sous le signe de la tendresse amoureuse, est d’abord celle d’une réappropriation de son corps.
Je lance un regard plein d’amertume vers mes robes courtes et mes vestes cintrées. Quand je m’aperçois dans le miroir, je me scrute méticuleusement, l’œil comme un couteau affûté. Je palpe les muscles entre mes paumes, les fais rouler d’un doigt à l’autre. Je suis faite de coups de pinceau et de costumes de théâtre : lorsque je pense à qui je suis, je ne vois qu’une actrice mal taillée pour son rôle. Joues fardées, trait noir sans compromis barrant la paupière, odeur florale capiteuse qui émane du creux du cou. Mon corps ne m’appartient pas. Il s’agite en automate selon ce que le reste du monde lui commande de faire. […]