Étudiant, Paul affiche une allure androgyne : ça s’est fait comme ça, par rébellion, puis par envie de jouer avec les codes. Un soir, alors qu’il marche dans la rue avec une amie, il et elle sont apostrophé·es par un groupe de garçons qui les prennent d’abord pour deux femmes. Quand ils réalisent que Paul est lui aussi un homme, leur attitude change du tout au tout.
Cette histoire se déroule il y a deux ans à Lille, près du palais des Beaux-Arts. C’est presque l’heure du dernier métro. Mon amie Camille et moi venons de quitter le groupe d’ami·es avec qui nous avons passé une soirée dans un bar, et nous nous apprêtons à rentrer chez nous, après avoir discuté de nos études et de ce que nous en attendons.
À cette époque, je suis encore étudiant en lettres. Je ne suis alors pas certain des mots pour me définir, ni conscient que « homme cisgenre » peut suffire à me décrire. Dès mon enfance, je n’ai pas su, pas pu, adhérer à certains codes de virilité. Mon androgynie est alors trop mal maîtrisée pour me rendre compte que je peux être un homme tout en me sentant étranger à ces codes. Et à vrai dire, cela ne me préoccupe pas beaucoup. Au début de mon adolescence, période où je me suis laissé pousser les cheveux par esprit de rébellion, cette androgynie était accidentelle. J’ai appris peu à peu à en jouer avec des vêtements aux coupes bien choisies, un ton de voix qui prête à confusion. Je suis un habitué des « bonjour madame, ah pardon, monsieur » et, sincèrement, ça ne me chagrine pas. La curiosité et la méchanceté d’autrui sont les fibres qui m’ont permis de tisser mon identité, quand bien même j’aurais voulu par moments me débarrasser de ces petits fils gênants qui ont pu me faire douter de la solidité du tissu. Camille et moi discutons.
Tout à coup une voix, tout à coup plusieurs voix, un chœur mal accordé, nous les entendons derrière nous et nous arrêtons de parler, nous ne savons pas d’où elles viennent, et nous ne déchiffrons pas le message qui, nous le savons d’instinct, nous est adressé.
DES MACHO MEN QUI SE SONT MIS EN TÊTE D’EMMERDER DES NANAS
« Eh les meufs, vous êtes trop bonnes ! » Camille et moi attendons maintenant de […]
Retrouvez l’intégralité de cette dernière chronique réalisée dans le cadre d’un atelier d’écriture sur le thème « genre et ville », au sein du Labo 148 dans La Déferlante #8.