La réforme des retraites, en débat depuis lundi 30 janvier au sein de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, est présentée tantôt comme un moyen de corriger les effets néfastes du système actuel pour les femmes aux carrières hachées, tantôt comme une réforme qui, au contraire, les pénalise. Parmi les professions les plus précaires – temps partiels fréquents, pénibilité forte – celles du nettoyage compte un grand nombre de femmes et de personnes issues de l’immigration. Quel avenir la réforme réserve-t-elle à ses travailleur·euses ? La réponse dans cet entretien avec Camille El Mhamdi, juriste de la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière (CNT-SO).
À quoi les travailleurs et travailleuses du nettoyage doivent-elles s’attendre si la réforme des retraites est adoptée ?
De façon générale, dans le système actuel, les pensions des femmes sont inférieures de 40 % à celles des hommes. Cette réforme ne met pas fin à cette iniquité. Au contraire, en repoussant l’âge légal de deux ans pour tout le monde, elle va en fait conduire les femmes à travailler, en moyenne, sept mois de plus, contre cinq mois pour les hommes. Le rapport d’impact qui accompagne le projet de loi le dit très clairement.
Cette injustice sera encore plus forte dans le secteur du nettoyage en raison de sa structuration. Parce qu’il s’agit d’un secteur particulièrement féminisé – par exemple, 95 % de nos adhérent·es sont des femmes –, mais aussi parce que ces travailleuses sont majoritairement de nationalité étrangère : elles sont souvent arrivées en France après l’âge de 30 ou 40 ans. Le fait de commencer à cotiser tard les dessert mécaniquement.
Les carrières hachées sont particulièrement nombreuses dans le secteur de la propreté. Cette réforme parvient-elle à gommer les effets d’une carrière incomplète ?
Non. Quand le gouvernement brandit, par exemple, la prise en compte des congés parentaux dans la comptabilisation des trimestres de cotisation, il la limite à quatre trimestres supplémentaires. Or, les femmes travaillant […]

Les tâches liées au nettoyage sont exclues des critères de pénibilité du système des retraites.
Crédit photo : Creative Commons.
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