L’une est une actrice populaire, à la gouaille et au féminisme affirmés. L’autre est la première femme de chambre française à avoir été élue députée. Corinne Masiero et Rachel Keke partagent des combats communs : contre l’exclusion, contre les violences sexistes et sexuelles. Elles ne s’étaient jamais croisées. Dans « le saint des saints » des lieux de pouvoir, le palais Bourbon, où s’est tenue leur rencontre, elles ont parlé de mépris de classe, de l’inceste, des femmes qui gagnent 800 € par mois, de fringues comme cheval de Troie et de la place de la musique dans la lutte. Avec une énergie et des rires salutaires.
Vous vous rencontrez toutes les deux pour la première fois sous les ors de la République, dans le cadre très solennel de l’Assemblée nationale. Un décor assez inattendu pour des transfuges de classe, des rebelles, des « grandes gueules »… Comment vous sentez-vous ici ?
CORINNE MASIERO Je ne sais pas trop, mesdames. Je vais en parler à ma prochaine séance de psychanalyse… En fait, je n’étais jamais entrée dans l’Assemblée nationale. J’ai souvent manifesté devant, notamment avec les InterLuttant·es ¹, un collectif qui organise des tas d’actions, des occupations… Mais c’est très étrange : Rachel, ton élection a changé quelque chose. Pour la première fois, je me suis dit : « Putain, est-ce qu’il ne faudrait pas que je m’investisse aussi dans ce que j’appelle la “politique politicienne” ? » Môme, je me suis impliquée dans un parti d’extrême gauche et les deals entre opposants politiques m’ont rapidement dégoûtée. Un gars de ce parti m’avait dit : « Si tu veux faire de la politique, il faut apprendre à te salir les mains. » Ah bon ? « Bah tiens, voilà mon badge, salut, je me casse. » Cet engagement-là, c’était faire trop de concessions par rapport aux valeurs qui sont les miennes.
Plus tard, si j’ai accepté d’être sur une liste électorale, c’était juste pour aider des camarades. Les étiquettes de parti continuent de me faire peur. Je n’ai pas envie qu’on me foute dans une case. Je veux être libre. Mais depuis que tu t’es présentée comme députée, Rachel, je me dis : […]
Retrouvez l’intégralité de cette rencontre inédite entre Rachel Keke et Corinne Masiero dans La Déferlante #9.