Comment choisit-on les thèmes abordés dans la revue ? Cette question revient régulièrement lorsque nous rencontrons les lectrices et lecteurs. Autant que possible, nous essayons d’alterner des dossiers ancrés dans l’actualité chaude – comme récemment avec le numéro « Avorter » – et d’autres, en apparence plus anodins, mais qui nous permettent de montrer que les dynamiques de genre se logent partout dans nos existences. Dans le numéro 14 – et avant de consacrer notre numéro de rentrée à la montée de l’extrême droite et aux manières d’y résister – nous avons choisi le thème « Dessiner ». Un art, une technique, un univers qui connaît lui aussi sa révolution féministe.
Pour imaginer des angles de sujets et des articles, nous avons soumis cette thématique au comité éditorial de la revue : un groupe de journalistes, militant·es, universitaires, qui rassemble désormais une vingtaine de personnes. Apportant chacune et chacun son expertise et sa connaissance d’une facette du sujet, ils et elles nous ont soumis plusieurs idées d’articles : l’aventure 100 % féminine de la revue de bande dessinée Ah!Nana dans les années 1970 ; la féminisation de la pratique du tatouage ; le succès d’un collectif queer qui révolutionne la pratique du modèle vivant et propose de représenter les corps dans une grande diversité, l’art du manga féministe et sa manière de questionner les représentations binaires du genre, mais encore le dessin comme outil thérapeutique pour les victimes de violences politiques ou intimes. Ces discussions nous ont permis de définir le périmètre de notre dossier en une trentaine de pages, car nous n’avons pas la possibilité d’être exhaustives. Nous avons, par exemple, choisi de nous limiter à la pratique du dessin, sans traiter – en tout cas pour l’instant – de la peinture et des autres arts graphiques.
« Depuis ses débuts, La Déferlante s’est entourée de nombreuses illustratrices »
Une fois ces idées posées, nous avons construit le « chemin de fer » de la revue, c’est-à-dire son menu, article par article. Et tandis qu’avec l’ensemble de l’équipe de fabrication (graphistes, maquettistes, iconographes), nous définissions la configuration de chaque page, nous avons commandé les papiers à des journalistes et auteur·ices indépendant·es.
Depuis ses débuts, La Déferlante s’est entourée de nombreuses illustratrices, aussi bien pour les pages de bande dessinée que pour accompagner nos articles. Il nous a semblé important qu’elles aient, chacune, avec sa voix et son style, une place de choix dans ce numéro. Vous retrouverez ainsi dans ce dossier les dessins de Delphine Panique, le strip de Salomé Lahoche ou encore une carte blanche à l’artiste Nygel Panasko qui dénonce le racisme dans le milieu très blanc de la bande dessinée. Elles sont aussi nombreuses (Lisa Mandel, Mirion Malle, Julie Delporte ou encore Alison Bechdel) à accompagner l’article de Camille Regache sur le boom de la bande dessinée lesbienne.
Riche de ces textes et de ces illustrations inédites, ce dossier montre que le dessin permet finalement de faire exister des récits là où il n’existe plus ou pas encore de mots. Par l’humour ou l’émotion qui s’en dégage, il questionne l’ordre établi et esquisse des chemins d’émancipation.
« Dessiner, esquisse d’une émancipation » est disponible en précommande sur notre site et sera disponible en librairie à partir du 31 mai.